Excuses bancales [Azula]

Les évènements précédents avaient bien amusé le créateur, cela faisait un moment que tout était tranquille et un peu d'action avait éveillé son esprit joueur. Profitant de sa nouvelle acquisition, à savoir un corps, il avait décider de sortir du café afin de semer un peu la pagaille. Après tout, avec un corps qui n'était pas le sien, il ne serait pas jugé responsable des traces qu'il laisserait sur son passage, n'est-ce pas? Cassian lui devait bien ça de toute façon, il l'avait sauvé. Contre son gré? Pas vraiment. Enfin, un peu quand même, il ne lui avait même pas laissé le temps de réfléchir à sa proposition... enfin, l'important était qu'il pouvait maintenant agir sans crainte et torturer à loisir sans avoir à s'inquiéter, pourquoi s'inquièterait-il? Il était le roi, le chef, l'empereur, le monarque tout puissant, le boss, le patron... c'était lui qui possédait le pouvoir, lui et lui seul! Personne ne pouvait se mettre en travers de sa route.

Il se dirigea vers le parc, un idée en tête. Cassian ne lui pardonnerait jamais. Tant pis. Tant pis? Tant mieux plutôt, la haine de cet insecte prouvait son infériorité envers lui, c'était d'ailleurs assez drôle de le voir se débattre dans le flot de la vie, incapable d'être maître de son destin, un peu comme lui avant... comme lui? Avait-il était comme ça? Jamais.

En entrant dans la prairie, le créateur ne put s'empêcher de sourire. Cela promettait d'être drôle, très drôle. Il accéléra le pas ne pouvant retenir son impatience puis lorsqu'il arriva à proximité de la personne qu'il était venu voir, il ralentit progressivement pour ne pas paraître trop suspect à cause d'une arrivée précipitée.

Elle était assise sur l'herbe, peut-être était-elle allé ici pour apaiser son esprit? Qui sait, elle était imprévisible. Avait-elle pressentie sa présence? Il le saurait bien assez tôt.

- Comment vas-tu? Tu t'es calmée?

Difficile d'agir comme le cloporte à qui appartenait ce corps, il ne tiendrait pas longtemps avant d'être découvert, enfin il espérait pouvoir se délecter de la suite des évènements.

La sensation de ne plus contrôler son corps alors que celui-ci bouge est vraiment étrange. Personne ne pourrait s'habituer à ça, même soumis à cet 'exercice' de façon régulière, le trouble qui s'installe dans l'esprit à ce moment là est toujours aussi intense. Cassian avait déjà subi à plusieurs reprises cet emprunt corporel, il en ressortait toujours comme amnésique, en se réveillant dans un endroit où il n'était pas aller par lui-même, après avoir fait des actes dont il ne se souvenait pas. Au début, il pensait à une sorte de trouble mental agissant comme une gomme encéphalique, lui détachant quelque parcelle de mémoire aléatoirement. Il avait cependant vite compris qui était l'auteur de ces vides lorsqu'il avait commencé à entendre cette voix dans sa tête, une voix moqueuse qui prenait sans cesse une intonation supérieure... ce n'était pourtant qu'une voix, une onde sonore prétentieuse et opportune se servant du corps de quelqu'un d'autre à défaut d'en posséder un. Un esprit détestable en tout point, lui volant sa vie afin d'en faire ce que bon lui semblait... capable de tout gâcher si l'envie était présente...

L'enveloppe restée au sol se mit à bouger légèrement lorsque l'esprit de son hôte revint. Le sol était chaud à cause de la colère de l'esprit et Cassian ne semblait pas décidé à sortir de sa torpeur. Il se blottit dans l'herbe carbonisée comme un chat dans un panier en proie à plus de chaleur. Il resta un instant dans sa position, recroquevillée sur lui même puis il s'agita dans son sommeil. Il ouvrit finalement les yeux, regardant avec appréhension où il se trouvait. Il ne mit pas longtemps à reconnaître les arbres qui longeaient la prairie du parc et il se releva pour épousseter ses vêtements couverts de cendre. C'est après avoir terminé son travail de nettoyage qu'il se rendit compte de la présence de l'esprit, ce qui le fit trébucher en arrière. Depuis quand était-elle ici? En même temps il aurait dû se douter de quelque chose avec l'odeur de brûler ambiante... Ses yeux étaient écarquillés alors qu'il se remémorait les évènements antérieurs. Il se calma un peu et se releva en flageolant sur ces jambes.

- Je... je suis...

Il avait l'impression d'être un jeune bambin n'ayant pas encore appris à parler... il resta un moment silencieux incapable d'articuler le moindre mot, aussi simple soit-il et se décidé finalement à utiliser les gestes afin de montrer à l'esprit son regret et afin de lui adresser ses excuses. Il s'inclina maladroitement en direction de la jeune femme et attendit qu'elle réagisse. Au mieux, elle comprendrait et accepterait, au pire, elle le carboniserait sur place sans la moindre pitié... l'espoir fait vivre?

-« Finalement il était dans ton corps, il m'a parlé et il a disparu quand tu t'es écroulé. »

Ses doutes étaient confirmés. L'esprit avait une fois de plus pris possession de son corps pour aller découvrir le vaste monde qu'il avait créé. Cassian savait qu'il n'était jamais seul, qu'il l'épiait sans cesse afin de trouver un moment opportun... mais malheureusement, il ne pouvait être plus qu'un simple spectateur de sa propre souffrance, sa faiblesse l'empêchant d'agir de manière utile contre cette entité surpuissante qu'était le créateur. Il n'y pouvait tout simplement rien. Dans son état actuel du moins. Il leva son regard vers Azula et la regarda avec un léger sourire aux lèvres, il était heureux que l'esprit semble lui avoir pardonné son précédent écart et était en quelque sorte reconnaissant envers son bourreau qui, en plus de l'avoir sauvé de l'incendie, lui avait permis de s'excuser. Il n'était pas pour autant fier de ce sentiment de gratitude envers lui, celui que l'on déteste sans savoir qui il est, celui que l'on voudrait voir disparaître, cela lui donnait l'impression d'aller à l'encontre de la volonté commune, d'être dans son camp... et il n'aimait pas cette pensée. Cassian s'extirpa de son monologue mental pour revenir à la situation actuelle, il se rendit compte que pendant toute sa réflexion il n'avait pas quitté l'esprit des yeux et rougit violemment en baissant la tête. Il essaya de trouver de quoi se défaire de son gène et prit finalement la parole.

- Je suis désolé pour ce qu'il s'est passé...

Le jeune homme se sentait en parti responsable de l'apparition du créateur, c'était tout de même son corps que celui-ci avait utilisé afin de faire enrager Azula, il aurait pu essayer de résister, de garder son esprit en éveil et de reprendre le contrôle... mais il ne l'avait pas fait, même si cela s'était soldé par un échec, sa conscience se serait sentie plus tranquille s'il avait eu le courage de montrer le moindre signe de résistance.

Perdu dans des pensées obscures, Cassian était inconscient de ce qui se passait autour de lui. Il ne voyait plus la clairière, ne sentait plus la brise sur son visage ainsi que la présence d'Azula... il n'entendait rien à part l'intonation persistante du Créateur, s'immisçant de plus en plus profondément dans son esprit comme pour en prendre une fois de plus le contrôle.

C'est lorsqu'il sentit quelque chose de chaud sur sa joue qu'il revint finalement à la réalité, cette présence rassurante avait chassé l'Hôte de ses pensées. Il mit du temps à comprendre la situation et à réaliser sa position. Le contact, ce n'était pas son truc. Ses globes oculaires se remplirent de surprise et son visage devint rouge de gène. Pourquoi avait-elle donc mis sa main sur sa joue? Une fois de plus, après une tentative désespérée de prendre la parole afin d'éclaircir les évènements présents, un flot de pensées pris le contrôle et le fit de nouveau plonger dans un état second, coupé du monde, fixant Azula avec incompréhension.

Pourquoi? Il avait de nouveau la mauvaise impression d'avoir loupé un épisode de sa propre vie. Il se retrouvait seul dans le labyrinthe qu'était devenu son pauvre cerveau trop sollicité, fuyant le surplus d'idées qui s'accumulaient sans pouvoir trouver la sortie. C'est alors qu'il commença à paniquer, avait-il dit quelque chose de déplacé à l'esprit? Allait-elle une fois de plus essayer de le griller avec une de ses boules de feu? Imprévisible. Cet air bienveillant que l'on pouvait déceler sur le beau visage d'Azula était-il réel? Où était-ce le calme qui précède la tempête?

Cassian prit une grande inspiration et réussit à émerger du monde parallèle que son encéphale avait créé. Il se prépara à briser le silence au moment ou un murmure porté par le vent se fit entendre.

"Est-ce qu'elle est douce?"

Douce? La voix, elle, l'était sans en douter. Légère, agréable, apaisante. La voix du vent. On ne pourrait mieux la définir. Cependant, cette soudaine intervention avait laissé le jeune tenancier perplexe, incapable de comprendre le sens de cette phrase pour le moins étrange qui, sortie de nulle part, avait ruiné ses efforts. Cependant, l'interpellation n'avait pas été sans utilité, Cassian avait réussi à quitter le regard de l'esprit de feu pour observer les environs à la recherche du propriétaire de ces curieux propos. A peine eut-il tourné la tête que sa joue libre fut prise d'assaut.

Coincé entre deux présences féminines, cela aurait pu être le plus beau moment de sa courte vie, s'il savait apprécier les femmes... il n'était pas assez confiant pour profiter de ce genre de situation, vraiment pas assez. Il cligna des paupières à plusieurs reprises afin de s'assurer qu'il ne rêvait pas. C'était bien réel. A son plus grand désarroi il était en présence de deux des cinq esprits emprisonnés par l'Hôte, l'air et le feu... deux femmes... avec leur main posée sur ses joues... une situation plutôt tendue. Surtout quand on arrive pas à se souvenir de comment tout cela est arrivé. Ses pensées n'étaient plus très claires, ni très saines. Que voulez-vous, il était un homme, sa réaction était tout à fait normale. Il rougit de plus belle après avoir scruté les images cérébrales qui lui arrivaient à une vitesse folle......... on pouvait dire qu'il avait de l'imagination. Prenant son courage à deux mains il réussit enfin à débloquer une parcelle de neurones occupés à fantasmer sur l'opulente poitrine d'Azula pour qu'ils s'attèle à défaire la paralysie temporaire de ses jambes ce qui lui permit de reculer et ainsi quitter le contact des deux femmes avec son visage en surchauffe. Sans le vouloir, quelques mots s'échappèrent de sa bouche sans se soucier des soucis qu'ils apporteraient au jeune tenancier.

- Je... je ne suis pas prêt!!

Alala, les hormones... ça vous joue de bien mauvais tours. Comment allait-il pouvoir réparer ça? Il n'avait pas d'excuse valable. Juste après avoir énoncé cette phrase aux multiples interprétations il mit sa main sur sa bouche comme pour éviter que tout autre propos suspects ne s'échappent.